logo site
logo linkedin logo twitter logo facebook logo insta

BLOG

Les Bonnes Âmes

- Réflexions - Vendredi 17 Février 2023


"Madame Gabrielle Rubin étant décédée le 27 décembre 2022, ce texte est publié à titre posthume, selon sa volonté et avec l'accord de sa famille."

Les Bonnes Âmes

Mon titre est à peine ironique, tant les personnes dont je vais parler sont persuadées d’apporter une aide efficace à leurs amis lorsque ceux-ci sont dans la peine, sans se douter qu’en toute innocence ils n’ont fait que l’aggraver : satisfaits d’eux-mêmes et sûrs de leur bonté, ils quittent sereinement celui ou celle dont ils viennent d’augmenter le malheur.

Jacques, par exemple, avait perdu presque en même temps son travail et son épouse partie avec un autre, et se trouvait pour cela en pleine dépression. 
Il faisait tout son possible pour sortir de cet état, prenait régulièrement les remèdes prescrits par son médecin et essayait de suivre les conseils des amis qui voulaient lui remonter le moral. Mais même Paul, qui venait pourtant le voir presque chaque jour et qui était le meilleur d’entre eux, n’arrivait pas à le sortir de sa morosité. 

Tout à son dévouement, et voyant la mine défaite et le regard mélancolique de son ami, Paul s’acharnait à lui expliquer que ce n’était qu’un mauvais moment à passer, qu’il était jeune et en bonne santé et que grâce à son courage et à ses grandes capacités, il allait bientôt retrouver la joie de vivre.
C’est ce qu’on dit généralement aux déprimés mais cela restait sans effet, ce qui désolait Paul, qui ne savait plus quoi faire pour aider son ami.
Jour après jour, il lui avait répété ces arguments sous différentes formes, attristé par son peu de succès mais persuadé d’avoir tout fait pour l’aider, alors qu’un peu d’empathie lui aurait permis de sentir que son intervention était plus qu’inefficace : elle aggravait le mal du malheureux déprimé qui s’était senti encore plus incompris, encore plus seul qu’avant cette visite, comme abandonné par celui qui était le plus à même de l’aider.
Jacques m’avait parlé de ce sentiment d’isolement avec fatalisme, persuadé comme il l’était d’être définitivement destiné au malheur, jusqu’au jour où il avait enfin avait laissé éclater sa colère contre Paul en l’accusant d’être un mauvais ami.

C’était injuste, mais c’était un bon signe car, au lieu de penser et de dire que c’est normal d’être déprimé, qu’on ne peut se fier à personne et que lui, en tout cas, était seul au monde depuis toujours et pour toujours, sa colère montrait qu’il commençait à sortir de sa dépression puisqu’au lieu de penser que le malheur est inéluctable et définitif, il en accusait une personne.

Ce que sans le savoir il reprochait à son ami, c’était d’avoir été incapable de « se mettre à sa place » comme le disent si bien les mots. 
Mais Paul, parce qu’il n’était pas déprimé, pouvait utiliser les arguments de la réalité, en oubliant que Jacques, tout en connaissant ces justes raisons, était incapable de les utiliser car la dépression peint tout en noir et ne prend en compte ni les souvenirs heureux et consolants, ni l’espoir d’un futur favorable. Les deux amis soudain ne se comprenaient plus et Paul, momentanément dépourvu d’empathie, était incapable de ressentir ce que Jacques éprouvait.
Pour comprendre la détresse de son ami, Paul aurait dû penser comme Jacques, sentir comme lui, souffrir comme lui, avant de redevenir lui-même pour pouvoir trouver les mots et les gestes capables d’adoucir – un peu – la douleur de son ami.

Un autre exemple est celui d’une de mes amies, vieille dame âgée mais à l’esprit encore alerte, que la réaction de ses parents et amis lorsqu’elle se plaignait de ses douleurs, exaspérait : à peu près inévitablement la réponse était : « Mais c’est normal à ton âge ! » phrase dont le ton, généralement guilleret, augmentait sa colère. Jusqu’au jour où, oubliant la politesse, elle avait vertement répondu que le fait que ce soit normal ne diminuait en rien sa souffrance.

Et le pire, ajouta-t-elle, était la réaction de ses interlocuteurs : mi-étonnée, mi-amusée, comme s’ils s’apercevaient tout à coup d’un fait étrange, mais qui n’avait rien à voir avec eux-mêmes, ni maintenant – ce qui était vrai – ni plus tard, – ce qui ne l’était pas. Lorsque cela se produisait elle avait l’impression d’appartenir à une autre espèce, celle où il est normal de souffrir, et donc où il est normal que nos amis ne soient pas compatissants envers nous. Là aussi l’empathie manquait, bien qu’elle n’eût pas été suffisante à elle seule. En effet, si l’empathie est une faculté que tous les êtres vivants possèdent depuis la nuit des temps, la possibilité de s’identifier – provisoirement ou non – à un autre n’implique pas que ce soit nécessairement pour lui faire du bien.

Ainsi les ruses de la mère oiseau, qui fait semblant d’être blessée pour attirer sur elle l’attention du renard, sont destinées à sauver ses oisillons et non à faire du bien au prédateur, comme l’est aussi le cas de nombreuses autres espèces animales – et végétales – qui se dotent d’un aspect rebutant ou attrayant pour berner leur prédateur et sauver ainsi leur vie ou celle de leurs descendants.
Il est vrai que la plupart des théoriciens1 préfère alors parler de mimétisme ou d’homotypie, réservant le terme d’empathie aux seuls humains, mais lorsqu’il s’agit d’animaux tels que les mammifères, la distinction se fait beaucoup plus floue2.

On voit que l’empathie se traduit par une adaptation corporelle – qui peut être permanente – chez les animaux, mais par une capacité psychique – qui doit être passagère – chez les êtres humains, et que c’est l’évolution qui a donné aux plus faibles les instruments de leur survie.

Pour nous, être en empathie avec une autre personne – réelle ou imaginaire – fait partie de tous les instants de notre vie. On en a besoin pour protéger sa vie et celle des siens, pour réussir ou pour en tirer du plaisir. Ainsi, celui qui espère un emploi essaye de s’identifier au patron pour mieux répondre à ses critères de choix, le profileur s’identifie au criminel, et le général essaye de découvrir la façon de penser et de réagir de l’ennemi.

C’est pour notre plaisir que nous nous identifions au héros de la pièce de théâtre et du film que nous voyons ou à celui du roman que nous lisons.
Il s’agit d’une autre facette de l’empathie, où s’identifier à l’autre, entrer en résonance avec lui, nous rend plus important à nos propres yeux.
Ainsi, suivant le moment et notre caractère, nous choisirons une représentation romantique, héroïque, historique ou même sado-masochiste – et les amateurs de ce genre de spectacle ne sont pas les moins nombreux – qui nous permet de nous identifier, sans danger, à tel ou tel personnage.

Pour que la définition généralement admise du terme empathie soit juste, il faut lui ajouter une dose de sympathie3, car c’est elle qui rend plus légère la souffrance de l’autre.
Ainsi, lorsqu’une maman câline son petit enfant et met un bisou sur le petit bobo qu’il s’est fait en tombant, celui-ci arrête de pleurer et retourne jouer calmement : il a – ou il croit avoir – moins mal. Et lorsqu’un de nos amis a partagé notre peine, nous lui disons : « merci, tu m’as vraiment soulagé/e » : le fardeau s’est fait plus léger parce que cet ami en a pris une part.

On voit que l’empathie et la sympathie régissent la plupart de nos échanges et que si elles nous font défaut nous perdons une grande part de notre vie affective : nous devenons aussi froids et indifférents que des machines.
Ces deux qualités ne sont cependant pas toujours présentes, même chez ceux qui en sont les plus fortement dotés. On ne sait pas bien pourquoi elles jaillissent à certains moments et non à d’autres, et leurs effets peuvent être différents : le manque d’empathie/ sympathie de Paul avait causé une véritable souffrance à Jacques, tandis que celui de ses amis avait surtout irrité ma parente.

Dans la majorité des cas heureusement, le dommage n’est pas irréparable.
 Tout autre est mon troisième exemple, celui d’un certain manque d’empathie/sympathie pour nos enfants et petits-enfants.
Une telle phrase nous fait bondir d’indignation parce que nos enfants sont ce que nous avons de plus cher au monde, que nous sommes prêts à tout sacrifier, et jusqu’à notre vie, pour eux et que nous employons toutes nos forces dans ce but.

On refuse avec horreur une telle accusation, car nous voulons de tout notre cœur être les meilleurs parents possibles pour nos enfants et petits-enfants et préparer pour eux une vie sereine et heureuse. 
Et pourtant, par notre incapacité à nous mettre à leur place (à nous identifier à eux) nos actes disent parfois le contraire.

Le couple sympathie/empathie est en effet « à éclipses », et on ne sait pas pourquoi ces facultés tantôt s’activent et tantôt restent inertes. Notre capacité de nous mettre « à la place de l’autre » s’est par exemple brusquement réveillée quand nous avons découvert (en 2015) la photo du corps d’Aylan, celle d’un petit garçon abandonné, oublié sur une plage et infiniment solitaire, mort à cause d’une des ignobles guerres que se font les adultes.
On avait pourtant déjà vu quantité de photos d’hommes, de femmes, d’enfants martyrisés et tués. Mais c’est devant cette photo-là, ce petit enfant-là, que des centaines de milliers – peut- être des millions – de personnes ont pris conscience d’une horreur qu’ils voyaient jusque-là sans la faire leur.
Peut-être parce qu’ils ont cru voir, à la place d’Aylan, le petit corps de leur propre enfant ? Mais, tout à coup, l’infamie et l’injustice de cette mort leur ont semblé insupportables.
 Pendant un moment nous nous sommes tous mis à la place de l’Autre – celle du bébé ou celle de ses parents – et ce moment d’empathie a changé notre regard sur tous ceux, jeunes ou vieux, qui cherchent notre aide.

Alors je me demande quelle photo, quel article, quel leader sera capable de nous faire éprouver la même empathie/sympathie pour nos enfants et nos petits-enfants, et combien d’entre nous sont prêts à sacrifier quelques-uns des gadgets – ou des réelles inventions – qui nous facilitent la vie afin de leur laisser un monde vivable ? Nous savons que nous polluons sans mesure, que peu à peu nous détruisons notre environnement, que les animaux et les forêts, dont la perte équivaudrait pourtant à un arrêt de mort pour le vivant en général et pour l’humanité en particulier, disparaissent de plus en plus vite. 
Aveugles et sourds, nous refusons d’accepter certains sacrifices, pourtant relativement légers, mais indispensables si nous voulons vraiment laisser à nos descendants une Terre où il fait bon vivre. Après avoir vécu en paix avec son environnement pendant des millénaires, l’humanité est maintenant devenue une espèce invasive qui détruit tout sur son passage.
Voulons-nous donc léguer à nos enfants un monde en ruines ? Quelques voix consolatrices se font entendre : Hervé Le Bras, par exemple, nous rappelle en conclusion d’un article4 qui fait froid dans le dos, que « Les prévisions des démographes sont parfois fausses ». Mais quels parents serions-nous si nous étions capables de laisser au hasard ou à la chance le choix d’assurer (peut-être) l’avenir de nos enfants ?
 
1 Robert Vischer reprend en 1873 les idées de son père Théodore dans sa ‘Thèse Doctorale’ à ce sujet.
2 Cf. Konrad Lorenz et plusieurs autres éthologues.
3 Du grec Syn = avec et de pathos = douleur. ‘Participation à la joie ou à la douleur d’autrui’ (Dictionnaire Larousse).
4 Le Point n° 2245

© Gabrielle Rubin - Tous droits réservés
       

       
 
 

Lire la suite...

Les deux faces de la pensée magique

- Réflexions - Vendredi 17 Février 2023


"Madame Gabrielle Rubin étant décédée le 27 décembre 2022, ce texte est publié à titre posthume, selon sa volonté et avec l'accord de sa famille."

Les deux faces de la pensée magique

La pensée magique est généralement définie comme une forme de pensée enfantine qui aurait la capacité de réaliser les désirs sans intervention matérielle.
Pour Freud (Totem et Tabou) elle est un héritage de l’homme primitif qui « a une confiance démesurée dans la puissance de ses désirs. Au fond, tout ce qu’il cherche à obtenir par des moyens magiques ne doit arriver que parce qu’il le veut » autrement dit, il croit à « la toute-puissance de ses pensées ».

Dans le même texte, Freud signale que le narcissisme joue un rôle important dans la genèse de cette forme de pensée, mais sans lui attribuer une place centrale.
 Or c’est lui qui est à la base de la pensée magique, qui est elle- même un travers des mieux partagés : lorsque nous tombons amoureux par exemple, la sagesse populaire a beau nous dire que l’amour est aveugle, nous ne la croyons pas et, immanquablement, un amoureux trouve toutes les qualités à celle qu’il aime.

Son narcissisme le persuade qu’il a réalisé le rêve de chacun : rencontrer la personne qui lui est destinée, l’autre moitié de lui-même, et qu’elle est donc forcément un être d’une rare perfection. C’est en fait un déni de la réalité, une forme de pensée qui court-circuite la raison, ce qui la rend à la fois très facile à accepter et très dangereuse.
Cela a toujours existé, mais jamais autant que depuis l’invention des « faits alternatifs », qu’on eut appelés naguère « mensonges » ou « erreurs » et qui, parce qu’on les nomme « des faits », acquièrent le statut de vérités possibles. On peut ainsi inverser le sens des choses et modifier le réel sans effort.
La réalité n’est plus objective, elle est le choix que chacun en fait.

Pensée magique et Etat spectacle
On en a eu un remarquable exemple lors de l’élection présidentielle de 2017, qui a souvent été composée d’exhibitions pittoresques plutôt que de discussions ou d’interviews qui auraient permis à chaque candidat d’exposer clairement ses idées et les moyens qu’il comptait mettre en œuvre pour les appliquer. Au lieu de cela, nous avons eu droit à une avalanche d’idées, séduisantes mais irréalisables, dont les promoteurs se sont bien gardés, et pour cause, de nous dire comment il leur serait possible de les mettre en pratique.
Quelle surestimation de soi, quel narcissisme survolté a poussé certains de nos concitoyens, qui n’avaient ni expérience, ni troupes, ni alliés, à être sûrs qu’ils seraient capables de diriger convenablement le pays ?
Cela, seul celui qui croit à la toute-puissance de ses pensées peut s’en persuader, et en persuader d’autres ensuite.
 Ainsi en a-t-il été de ces candidats qui ont légalement occupé nos écrans, nos journaux, nos radios et l’espace public durant plusieurs semaines : sans autre bagage que d’avoir convaincu 500 élus (sur 47 000) de leur donner la possibilité de devenir Le Président de la République Française, ils ont eu le privilège d’être interviewés par quantité de médias.
Avec gourmandise, mi-sérieux mi-rigolards, les journalistes s’en sont donné à cœur joie avec ces hommes et femmes qui présentaient des projets, tantôt sympathiques, tantôt farfelus, tantôt même parfois intéressants, mais qui avaient tous en commun le défaut d’être irréalisables.
La loi a en effet donné à tout citoyen français, de plus de 18 ans, sans casier judiciaire et ayant obtenu le parrainage de 500 élus dans au moins 30 départements différents, le droit de gouverner la France et de la représenter auprès des autres pays ce qui, normalement, semble requérir des qualités exceptionnelles.
Et c’est pourtant le seul « métier » pour lequel aucun apprentissage n’est exigé, ce qui offre à chacun la possibilité de se croire destiné à être le successeur du Roi de France. Celui-ci, étant le représentant de Dieu sur Terre, avait tout naturellement la science infuse et chacun de ces candidats était intimement persuadé qu’il n’avait nul besoin de preuves, puisque lui savait d’instinct.
Il est dès lors normal que si pour devenir plombier, instituteur, infirmière, fonctionnaire ou autre on exige plusieurs années d’études et un diplôme, devenir Président de la République n’en exige aucun : pas besoin de permis de conduire pour diriger le Char de l’Etat, pas besoin d’apprentissage pour parler d’égal à égal avec les autres dirigeants, ni pour choisir entre la guerre ou la paix et décider d’utiliser ou non l’arme nucléaire.
Forts de cette certitude et dotés d’un Ego grand modèle, ils se sentent capables d’assurer l’avenir du pays. 
Leurs troupes sont maigres cependant et la constitution les oblige à nommer un gouvernement et à tenir compte de l’avis des députés et sénateurs.
Avec qui donc gouvernera l’élu.e ? Voilà une question sans intérêt pour des candidats dont la pensée est magique, et pour les médias qui, de toute façon, sont obligés de donner à tous le même temps de parole. Ce que veulent ces candidats c’est être reconnus et admirés pour leurs capacités exceptionnelles et ce que veulent les médias et le public, c’est du spectacle.

Alors où est le problème ?
 Justement là : dans le fait que les citoyens de ce pays - le pays de Descartes, des Lumières, des Encyclopédistes - acceptent passivement ce qu’on leur offre, c’est-à-dire une caricature de démocratie. 
Le bon peuple ne s’y est cependant pas laissé prendre, puisque ces candidats ont obtenu entre 0,18 % (65 586 voix) et 1,09 % (435 301 voix).
 Mais que la loi oblige une des plus importantes instances de la République à valider la candidature de ceux qui ne sont pas en mesure de l’assumer est une véritable insulte pour les citoyens. Et d’ailleurs les législateurs le savent aussi, puisqu’ils ont fixé à 5 % le nombre d’électeurs qu’un candidat doit avoir réunis sur son nom pour que la République lui rembourse ses frais de campagne. Ils ont donc estimé que lorsqu’on n’est pas capable de faire partager ses idées à un nombre important (environ 2 000 000 pour le premier tour de 2017) de personnes, c’est qu’on n’est pas non plus capable d’être un candidat valable.
 On nous a dit que tous ces candidats apportent des idées neuves et font passer un air frais sur la campagne électorale. Mais dix millions de Français, accoudés au comptoir du Café du Commerce, sont capables d’en faire autant sans forcément se croire destinés à devenir Président de la République Française.


Nous avons connu autrefois Ferdinand Lop, dont le désir suprême était d’occuper ce poste. Le quartier latin lui faisait un accueil triomphal et propageait joyeusement ses idées. Parmi toutes ses inventions géniales ma favorite, en ces temps de pollution, est sa promesse d’installer Paris à la campagne pour que les Parisiens puissent jouir d’un air pur.
Il promettait aussi de construire des trottoirs roulants pour épargner de la fatigue aux péripatéticiennes, un pont de trois cents mètres pour y abriter tous les sans-abri et un toboggan géant, place de la Sorbonne, pour le délassement des étudiants. Ayant par ailleurs remarqué que la plupart des accidents de métro se produisaient en queue de la rame, il avait proposé cette solution efficace et peu coûteuse : supprimer le dernier wagon de chaque convoi.
Qui ne serait séduit par la force et la simplicité de ces promesses ? Si Ferdinand Lop avait mis de la gaité et un peu de folie dans les campagnes électorales d’autrefois, il n’en a pas été de même pour nos modernes magiciens, qui ont plutôt aggravé la morosité ambiante.

Que nous est-il arrivé et comment se fait-il que nous nous trouvions avec autant de candidats dominés par la pensée magique ?

Pensée magique et pensée rationnelle
C’est que la pensée magique a un gros avantage sur la vraie pensée, car étant à la fois instantanée et adhésive, elle ne demande aucune réflexion. Elle passe d’une tête à l’autre sans aucun effort et se love instantanément dans le cerveau de l’auditeur réceptif, d’où elle est toute prête à partir pour aller en infecter d’autres.

A l’inverse, lorsqu’on nous soumet une proposition raisonnable, notre propre raison s’en empare pour l’évaluer : cette idée est-elle réalisable ? Puis : sera-t-elle bénéfique ? Ce qui sera éventuellement suivi de recherches plus poussées ou de discussions entre amis. C’est donc un temps long, ce qui est un handicap important lorsqu’on parle à des gens que penser agace ou fatigue.

La pensée magique n’a d’ailleurs pas pour but de chercher la réalité mais de protéger de la réalité, car croire aux faits alternatifs permet de se sentir supérieur aux spécialistes et de faire partie de ceux auxquels « on ne la fait pas ».

Pensée magique, faits alternatifs, déni de la réalité et projection sont les moyens qu’emploie le narcissisme pour nous persuader de notre propre supériorité.

Les complotistes
Mais la pensée magique n’est pas réservée aux élections, elle nous cerne de toutes parts, soutenue par des groupes divers et nombreux, au premier rang desquels se trouve celui des Illuminati : présents mais invisibles depuis la nuit des temps, ils sont « l’élite de l’élite » d’une intelligence et d’une sagesse supérieures et, comme tels, destinés à gouverner la Terre : pour le meilleur suivant leurs admirateurs ou pour le pire pour les autres.
Il y a aussi ceux qui ne revendiquent pas une aussi prestigieuse origine, mais auxquels leur narcissisme a donné la certitude qu’ils sont infiniment supérieurs au commun des mortels.

C’est le cas, par exemple, de ceux qui savent que la destruction des Twin Towers (le 11 Septembre 2001) n’est qu’une mise en scène orchestrée par les autorités des U.S.A. Ils plaignent les malheureux qui se laissent prendre aux mensonges absurdes que leur serinent leurs gouvernements, tout en essayant de ramener ces égarés dans le droit chemin.

Il y a aussi les « Platistes », de plus en plus nombreux, qui regardent de haut les niais qui croient que la Terre est ronde. Le récit du voyage de Magellan et les globes terrestres que nous offrons ingénument à nos enfants ne font que participer à la tromperie, tout comme les photos prises de l’espace par les astronautes, qui sont des montages mensongers de la Nasa.

Et puis, il y a les très nombreux groupes du Complot - de l’Etat, de la Finance, des Francs-Maçons, des Juifs, des Services secrets - qui savent que tous ces gens-là sont aussi puissants que maléfiques et qu’ils manipulent la vérité dans le but de camoufler leur dangerosité. S’il n’y avait pas de courageux citoyens (eux- mêmes) pour s’y opposer, ils deviendraient les maîtres du pays et le mèneraient à sa perte.

Parmi ces groupes, un des plus actifs est celui qui se charge de révéler le complot juif et l’incroyable puissance destructrice qui est la sienne.
On voit très vite, lorsqu’on parle avec un de ces complotistes, comment fonctionne leur système de pensée. Par exemple, si on demande comment, malgré une telle puissance, les Juifs ont été incapables d’empêcher la déportation et la mort de six millions des leurs, la réponse est toute prête : « Les chambres à gaz et camps de la mort n’ont jamais existé, ce sont de fausses informations qu’ils répandent pour nous tromper. »
Mais... les milliers de soldats qui les ont vus lorsqu’ils ont libéré ces camps ? Les récits des rares survivants ? Les enquêtes des grandes puissances ? Les aveux de certains nazis, etc. ? Mensonges que tout cela, comme les documentaires qui montrent les bâtiments, les barbelés, les fosses où l’on jetait les cadavres par milliers ne sont que des montages cinématographiques fabriqués pour brouiller les pistes.

On voit qu’il y a une incompatibilité entre la pensée rationnelle et la pensée magique car leurs arguments sont semblables mais inversés : ce qui est vérité pour l’une est mensonge pour l’autre et vice-versa.

Ils ne peuvent ni s’écouter ni s’entendre parce qu’ils ne sont pas dans le même espace psychique, les uns acceptant de soumettre leurs idées au doute - qui est un garde-fou -, les autres refusant tout ce qui pourrait ébranler des certitudes qui leur permettent de se sentir supérieurs.

Si un interlocuteur contredit une affirmation, celui qui a une pensée rationnelle demande à réfléchir, pas un complotiste : protégé par sa Pensée Magique, la réponse défensive est automatique « c’est un mensonge ! ».
Autrement dit, il a inconsciemment recours à la pensée magique, qui est le moyen le plus facile de restaurer un ego endommagé, parce qu’elle permet à celui qui se sent rejeté par la société, qui pense qu’il n’occupe pas la place qu’il mérite ou qu’il n‘est pas reconnu à sa juste valeur de - enfin ! - se sentir au-dessus du commun des mortels.

Les terroristes
Les policiers, les chercheurs et les journalistes nous donnent un portrait-robot presque identique d’une bonne partie des terroristes qui ensanglantent notre pays et qui tuent, sans discrimination, des gens qui avaient la malchance de se trouver là : ce sont des hommes jeunes, à la scolarité incertaine et qui ont un passé de petits délinquants qui les a menés à passer une partie de leur vie en prison.

Ils n’ont pas de métier et ne sont pas non plus de ces criminels prestigieux qui électrisent les foules et mobilisent les médias ; ils n’ont rien de ce qui suscite l’amour ou l’admiration des autres, rien donc qui leur permettrait d’être contents d’eux-mêmes et de se sentir reconnus.

Or, se sentir reconnu est un besoin fondamental pour l’être humain, et c’est pourquoi, dans notre pays et bien d’autres, le père déclare publiquement qu’il reconnaît pour sien l’enfant qui vient de naître, l’inscrivant ainsi comme membre de sa famille et comme citoyen.
C’est pour cela aussi que la plupart des gens rêvent d’être connus, sinon comme le sont les chanteurs, les chefs d’Etat, les sportifs ou les vedettes de cinéma, mais au moins comme celui ou celle qui est passé à la télévision, qu’on l’ait interrogé en tant qu’électeur, comme témoin d’un fait divers ou bien comme ayant été autrefois le voisin d’un homme célèbre.

Peu importe car ils deviennent visibles pour les passants, les voisins et les collègues de travail. Aussitôt la pensée magique refait surface et ils se sentent reconnus comme étant des êtres hors du commun.
Le terroriste n’est pas différent des autres hommes, lui aussi voudrait qu’on le reconnaisse et qu’on l’admire mais, au fond de lui- même (et c’est le pire) il sait qu’il n’a pas les qualités nécessaires pour cela.
 Alors il refoule cette idée et préfère accuser les autres de son malheur : il n’est désormais plus un raté mais un persécuté.

Et tout à coup il découvre, en lisant les journaux, par les réseaux sociaux, les prêches ou d’autres canaux, qu’il peut même devenir un héros.
 C’est une idée enivrante, comment y résister ? Bien des gens vendraient leur âme pour devenir célèbres et lui, qui ne s’aime pas lui-même, pourrait être admiré par des millions de gens sur toute la planète ?
Et le regard méprisant que les autres portent sur lui pourrait changer du tout au tout en un moment ! 
La pensée magique vient aussitôt lui murmurer que c’est Lui qui a été choisi parce que c’est Lui qui est le meilleur.
Il sait bien qu’il pourrait y perdre la vie, mais dans ce cas un Père puissant l’attendrait au Paradis, où les plus belles femmes lui ouvriraient les bras.
Ce genre de terroriste sait inconsciemment qu’il a pris un chemin sans issue et qu’il gâche sa vie, mais il refoule cette idée de toutes ses forces.
Il « roule des mécaniques », mais encore plus pour se rassurer lui-même que pour impressionner les autres, car il est prêt à tout pour (se) prouver qu’il est un héros et un martyr. 
Et on publie son portrait dans tous les journaux, et on interroge des policiers, des ex-agents secrets, des psys et des écrivains à son sujet.

En un mot, on fait exactement ce que lui-même et ses incitateurs désirent, ce qui va en pousser d’autres à en faire autant.

Le côté lumineux de la pensée magique
C’est celui que nous offrent tous ceux qui ont la vie qu’ils ont désirée : ingénieurs ou pompiers, écrivains ou artisans, génies ou bons professionnels, ils ont réalisé leur rêve d’enfant.
 Ceux-ci ont en effet une imagination débordante, il ne savent rien de la réalité et à leurs yeux tout est possible : les fées et les magiciens, Peter Pan et les sorcières, voler comme Harry Potter ou conduire un vaisseau interstellaire.
Mais qu’ils se voient en Superman ou en Zorro, qu’ils veuillent être celui qui découvrira le remède miracle ou le boulanger qui fera la meilleure baguette, qu’ils s’imaginent en footballeur ou en vedette de cinéma, ou encore qu’ils désirent tout simplement avoir une vie professionnelle et familiale heureuse, ces enfants vont réussir leur vie à condition d’avoir le courage de renoncer à la pensée magique.
C’est au moment d’aborder l’adolescence que la prise en compte de la réalité doit succéder au rêve, car pour être bénéfique la pensée magique doit laisser sa place et mourir en même temps qu’elle triomphe.
Tous les grands inventeurs, au sortir de l’enfance, ont suivi le chemin difficile de l’effort : si Wernher von Braun ne cache pas que c’est en lisant De la Terre à la Lune qu’il a eu le désir d’être celui qui ouvrirait la porte aux voyages dans l’espace, nous savons aussi que c’est parce qu’il a choisi d’être un écolier attentif puis, pendant de nombreuses années, un étudiant assidu, qu’il a réalisé son rêve. Et si Auguste Picard reconnaît volontiers que c’est parce qu’enfant il avait rêvé d’être le Capitaine Némo qu’il a créé son bathyscaphe, (un ancêtre de nos sous-marins), et que bien des Pasteuriens disent que c’est en apprenant l’histoire de Wilhelm Meister qu’ils ont décidé de l’orientation de leur vie, ce n’est pas grâce à la magie qu’ils y sont parvenus mais par leur assiduité à l’école et de longs et difficiles apprentissages.

On a le droit de rêver, et l’imagination est une puissante créatrice, mais il faut aussi savoir affronter la (dure) réalité si on veut s’accomplir.
 
© Gabrielle Rubin - Tous droits réservés
 
 

Lire la suite...

Les deux rôles symboliques du dirigeant

- Réflexions - Vendredi 17 Février 2023


"Madame Gabrielle Rubin étant décédée le 27 décembre 2022, ce texte est publié à titre posthume, selon sa volonté et avec l'accord de sa famille."

Les deux rôles symboliques du dirigeant

La diversité est toujours un enrichissement culturel et l’étude de l’art, de la façon de vivre et de penser, celle des jeux, des exercices physiques ou celle de faire la cuisine des différents peuples apporte un plus considérable à chacun des autres, tout comme un passage fluide entre les diverses sciences humaines offre à chacune un champ d’études (et, potentiellement de découvertes) plus vaste et plus assuré.

La psychanalyse, par exemple, s’adresse à une personne particulière lors du travail analytique, mais elle permet aussi d’éclairer certains aspects de la vie en société. 
En effet, de même qu’aucun de nous n’a de vrai sosie, nos sociétés ne sont pas non plus notre exact reflet. Il y a cependant des invariants qu’on retrouve chez les individus comme dans leur société : certains sentiments innés, qui les rassemblent et les unissent.

Le plus important de ces liens sont ceux qui relient le bébé à sa mère, puis à son père et ils se retrouvent, sans que nous en ayons conscience, dans maints aspects de nos structures sociales. Parmi les liens complexes qui unissent un enfant à ses parents, je ne retiendrai ici que le plus tenace : l’amour inconditionnel du bébé pour sa mère, dont une partie se reporte plus tard sur son père.
 Plus tard encore ces deux images seront projetées sur d’autres. Pour résumer à l’extrême, l’image du père se reportera sur celui ou celle qui représente la Loi, qui montre le juste chemin et protège grâce à sa puissance. 
L’Imago maternelle ira en revanche investir celle ou celui qui représente la tendresse, le dévouement et un amour sans failles. C’est ce qu’on appelle actuellement « le compassionnel » lorsqu’il s’agit d’un fait social.
Si cette image parentale ne correspond pas toujours à la réalité, – puisqu’il y a des mères peu aimantes et des pères indifférents ou même violents – elle est cependant indestructible parce qu’elle est innée : que celui qui représente la puissance et l’autorité soit une femme ou un homme, il ou elle sera symboliquement un père, et celui ou celle qui soigne, qui soutient, qui encourage, deviendra momentanément une mère quel que soit son sexe.
Ainsi, toute personne (enseignant, dirigeant d’entreprise, chef d’État ou autre) qui détient une parcelle de pouvoir et qui affirme connaître le chemin à suivre, sera considérée comme un père symbolique.
 N’appelle-t-on pas « Maître d’Ecole » l’instituteur, « Patron » le dirigeant d’une société commerciale, « Saint-Père » le Chef de l’Eglise, « Père de la Nation » ou « Petit Père des Peuples » le chef de l’État ?
Il est cependant indispensable que ces pères symboliques soient capables d’assumer un rôle maternel chaque fois que cela est nécessaire.
Je prendrai comme premier exemple le psychanalyste et sa constante préoccupation d’être à la bonne distance affective de son patient.

En ce qui concerne les contacts physiques cette distance tient en peu de mots : il ne doit y en avoir aucun, en dehors d’une banale poignée de mains à l’arrivée et au départ du patient, et tout échange hors du cabinet professionnel est à proscrire.
Trouver la bonne distance psychique est plus subtil et plus difficile, parce qu’elle doit être modifiée à chaque moment, suivant les circonstances et en tenant compte de multiples paramètres. Rester trop lointain donnerait au patient l’impression que son thérapeute est indifférent et mettrait une distance décourageante entre eux, tandis qu’une trop grande proximité risquerait de créer une relation fusionnelle.
Il lui faut donc rester constamment attentif aux besoins de son patient et changer suivant les circonstances : à certains moments, à la suite d’un rêve ou d’une circonstance qui mobilise ses souvenirs, le patient va retrouver les sentiments qu’il a éprouvés à tel moment de sa relation avec son père et, à d’autres moments, il va se souvenir de certains épisodes marquants de sa relation avec sa mère.
Être attentif à ces moments privilégiés va permettre au thérapeute de trouver la bonne distance, plus proche en cas de transfert maternel, ou plus fermement rassurante quand le patient voit en lui une image paternelle.
Mais il doit ensuite retrouver rapidement la distance d’une nécessaire neutralité.

Un contre-exemple, si extraordinaire qu’on pourrait le croire inventé, est celui du Psychiatre Greenson et de sa patiente, la très célèbre Marilyn Monroe, qu’il entreprit de « psychanalyser ». 
Le Docteur Greenson a violé presque toutes les lois qui régissent notre profession, avec le résultat que l’on sait : une augmentation de l’auto-destructivité de Marilyn, son impossibilité d’établir une relation stable et son besoin irrépressible d’avoir un partenaire fusionnel, rôle rempli par Greenson jusqu’à leur séparation brutale.
En effet son psychiatre l’autorisait à lui téléphoner aussi souvent qu’elle le désirait, et même à débarquer nuitamment dans l’appartement qu’il occupait avec sa famille, et lui-même se permettait de lui donner des conseils au sujet de son travail et de sa vie amoureuse.
Or, donner des conseils c’est aller contre l’esprit même de la psychanalyse, dont le but est de permettre au patient de comprendre pourquoi il souffre et, après un long travail, de devenir capable de prendre par lui-même de meilleures décisions. Agir autrement conduirait le patient à rester dépendant de son thérapeute comme il l’était de ses parents lorsqu’il était un enfant. En permettant à sa patiente de lui téléphoner à toute heure et de venir sonner à sa porte en dehors des séances, Greenson avait agi avec elle comme l’aurait fait une tendre mère, dont le désir est de combler toutes les attentes de son bébé.
Et il faisait encore la même erreur en venant s’interposer entre elle et son metteur en scène ou entre elle et ses amants : en croyant l’aider il la maintenait dans un état infantile. Il avait « oublié » qu’un adulte n’est pas un bébé, alors que s’il avait donné à Marilyn l’image du père fort et fiable qu’elle n’avait jamais eu, il l’aurait aidée à renoncer à chercher un impossible amour fusionnel, ce qui lui aurait ensuite permis de s’assumer et de décider par elle-même du chemin qui était le meilleur pour elle.

L’état fusionnel que l’attitude de Greenson avait laissé se développer entre lui et sa patiente n’était évidemment pas resté sans conséquences : lorsqu’en mai 1962 le thérapeute était parti avec sa femme pour un voyage de cinq semaines, laissant sa patiente désemparée par cette brusque et totale défusion, les désastres, comme on pouvait s’y attendre, s’étaient accumulés. Soudain seule, terrifiée et désespérée, Marilyn n’avait plus eu que les anti-dépresseurs pour l’aider. Elle en avait donc usé et abusé mais cela ne l’aidant guère elle s’était jetée, dans sa quête éperdue d’un peu d’affection, dans des aventures sexuelles désordonnées et dans toutes sortes d’excès qui avaient encore aggravé la situation.

Un « père social » n’est pas un psychanalyste, et c’est évidemment de façon moins minutieuse que ce père-là doit trouver la bonne distance. Cependant, pour lui comme pour ceux dont il a la charge, y parvenir est primordial, car lui aussi doit être capable d’écouter ceux qui dépendent de lui, de les comprendre et de satisfaire leurs justes demandes.
Mais il lui faut très vite après cela retrouver son statut de Chef (symboliquement de père), c’est-à-dire de celui qui sait, qui décide, qui montre le bon chemin et qui, en expliquant les raisons de ses choix obtient, sans utiliser de contrainte, l’accord de ceux dont il a la charge.

Il n’en était pas ainsi autrefois : Louis XIV ou Henry VIII d’Angleterre pouvaient avoir une conduite incohérente ou scandaleuse, leur légitimité n’était pas contestée puisqu’ils étaient rois de droit divin et qu’ils n’avaient donc pas de comptes à rendre. Cette autorité incontestée s’étendait aux pères plus modestes qui, nobles ou manants, les représentaient au sein de leur famille. Actuellement, celui qui occupe la place de dirigeant, qu’il soit enseignant, patron d’une entreprise, chef d’Etat, ou à n’importe quel autre poste de direction, doit prouver sa légitimité par une conduite irréprochable, faute de quoi un sentiment de profonde injustice s’installe : si elle/il est comme moi, ni meilleur, ni plus capable, ni plus fort que moi, pourquoi a-t-il ou a-t-elle, le pouvoir et pourquoi devrais-je lui obéir ?

Un exemple simple et que tout le monde connaît de la nécessité d’avoir tantôt un rôle maternel et tantôt un rôle paternel est celui de l’infirmière : compréhensive et compatissante lorsque la souffrance ou le désarroi de son patient l’exige mais capable d’imposer sa volonté si celui-ci refuse de prendre les médicaments prescrits ou prétend aller à la cafétéria alors qu’il doit garder le lit. Dans cette attitude difficile, ce qui aide les infirmières à garder le cap et à représenter tantôt l’un et tantôt l’autre des deux rôles symboliques, c’est qu’elle agit ainsi avec l’accord de tous : ni les autorités médicales, ni son intime certitude, ni les familles du malade ne songeraient un seul instant à lui demander de faire des entorses aux soins nécessaires, même par compassion envers la souffrance du patient.

C’est spontanément que la plupart des professionnels adoptent cette alternance, et respectent au plus près les besoins de ceux dont ils ont la charge. Mais il en est aussi qui, oubliant que tout ce qui est excessif est nuisible, se laissent entraîner par leur bon cœur et n’ont pas la force d’assumer la difficile mais indispensable fonction paternelle.

© Gabrielle Rubin - Tous droits réservés

Lire la suite...

Les mots qui blessent et les mots qui tuent

- Réflexions - Vendredi 17 Février 2023


"Madame Gabrielle Rubin étant décédée le 27 décembre 2022, ce texte est publié à titre posthume, selon sa volonté et avec l'accord de sa famille."

Les mots qui blessent et les mots qui tuent

Il y a des mots qu’on dit pour faire mal et d’autres qui sont responsables d’infinies souffrances et de millions de morts. Certains d’entre eux sont destinés à blesser et déstabiliser une personne particulière et d’autres à hiérarchiser la société, voire à en exclure certains groupes ; ils n’ont ni le même but ni le même impact, mais tous sont l’expression de la pulsion de mort de celui ou celle qui les prononce.

Les mots qui blessent
Il y a des mots qui déstabilisent l’adversaire en mettant en évidence ses défauts - réels ou supposés - et qui sont généralement dits d’un ton méprisant accompagné d’un haussement d’épaules qui en renforcent l’impact. Leur blessure est évidemment plus douloureuse et plus longue à cicatriser quand c’est un parent ou un ami qui la profère, et si un père (ou une mère) traite son enfant de « raté », de « minable » ou de « crétin », il va lui infliger une douleur qui ne s’effacera que très lentement, ou peut-être jamais.

D’autres mots, majoritairement reliés à la sexualité (censée être inexistante ou déviante) de la victime ont un double but : d’un côté ils sont destinés à humilier celui qu’ils visent et d’un autre côté, plus caché, ils servent à rassurer l’accusateur sur sa propre virilité en lui confirmant que lui n’est pas comme tous ces « cocus », « pédés » ou « tantouzes », que lui est « un vrai mec ».

Les femmes, quant à elles, étant traitées de « boudin », de « connasse », de « grosse conne », de « boulet », ou de « grognas- se » : j’en passe et des meilleures.
Et puis il y a aussi tous ces mots qu’on dit pour inférioriser toute une catégorie de personnes, comme, par exemple « bicot », « bougnoule », « youpin », « mal blanchi », etc.

Celui d’entre eux qui a eu la plus importante longévité est probablement « bâtard », qui doit être aussi ancien que le mariage et qui, tout en ayant perdu un peu de sa nuisance à cause de l’évolution des mœurs, fait encore des ravages.

Le sort de ceux qu’on désignait par ce nom est devenu plus détestable encore à partir du XIe siècle. En effet l’Eglise, qui voulait défendre l’indissolubilité du mariage, avait alors pratiquement exclu les enfants nés hors mariage de la communauté.
Ceux-ci, étant « des enfants sans père », n’étaient plus les enfants de personne. Ils n’avaient ni le droit d’hériter de leurs parents, ni celui d’exercer la plupart des charges publiques, et si ils étaient acceptés en tant que religieux, c’était pour s’occuper des tâches matérielles, les charges spirituelles leur restant interdites.
Cet ostracisme ne concernait bien sûr pas les bâtards de sang royal ou très noble, qu’une dispense spéciale, octroyée par le Pape, venait réintégrer au sein de leur famille.

Sept siècles plus tard Jean-Jacques Rousseau, dont tout le monde admirait l’Emile et toutes les femmes ventaient la pédagogie, pouvait dire qu’il avait abandonné les cinq enfants qu’il avait eus de sa maîtresse « parce qu’ils seraient mieux élevés à l’Hospice que par leur mère », sans susciter d’émotion.
La révolution n’y changea rien, puisque Napoléon Bonaparte, alors Consul, estimait que c’était « l’injure la plus grossière » que de traiter quelqu’un de bâtard et que Claude-Jean de Ferrière a pu écrire un peu plus tard qu’ils « sont regardés comme des étrangers dans leur propre famille ».

Depuis, bien des livres et récits récents nous ont appris la douleur brûlante qu’inflige ce mot : l’écrivaine Violette Leduc, par exemple, une amie intime de Jean-Paul Sartre et de Simone de Beauvoir, en a détaillé l’horreur dans son livre La Bâtarde : publié en 1964 avec un grand succès, il est toujours présent chez les libraires.
Son père était un notable que tous saluaient avec respect, mais qui changeait de trottoir quand il la croisait. Elle écrit : « Combien de ceux qui ont traversé une enfance et une adolescence ‘tordues’ à cause d’une malédiction qui pesait sur eux, ont passé leur vie à essayer de dissimuler, de nier, d’effacer autant que faire se peut ce stigmate d’infamie en se faisant discrets, en se rendant invisibles ».
Impitoyable contre elle-même, elle écrit plus loin : « J’aurais voulu naître statue, je suis une limace sous mon fumier. Les vertus, les qualités, le courage, la méditation, la culture, je me suis brisée contre ces mots-là ».
Narcissisme en berne, elle était persuadée que rien ne pourrait venir l’apaiser. Elle avait pourtant été reconnue comme écrivain, admirée par les intellectuels et faisait partie de l’élite, mais rien ne pouvait effacer la première blessure.

Les mots qui tuent
Il y a aussi un mot qui est à l’origine des terribles souffrances et de la mort, dans des conditions effroyables, de millions d’êtres humains : le mot « race ».

C’était pourtant un mot innocent avant qu’on n’en dévie le sens : lorsque nous parlons des différentes races de chiens, par exemple, nous n’avons aucunement pour but de dire que les chiens-loups sont supérieurs aux bassets ou que les chiwawas valent mieux que les labradors : leur apparence est différente, mais ils appartiennent tous à la même espèce.

Il n’en est plus ainsi lorsqu’il s’agit des êtres humains, depuis que la couleur de leur peau les a séparés en quatre « races », une séparation qui a fait des ravages.
La science a beau nous apprendre que la condition nécessaire et suffisante pour faire partie d’une même espèce est que les descendants nés de l’union de deux de ses membres soient eux-mêmes fertiles, nous n’en tenons pas compte. Nous avons « oublié » qu’une espèce peut se diversifier en races, mais que cette diversité n’en concerne que les aspects extérieurs.

Ce changement de sens est devenu apparent au sortir du Moyen-âge, lorsque la Controverse de Valladolid (1550/51) a vu s’affronter deux thèses : celle du dominicain Bartholomé de Las Casas, qui plaidait pour que les Amérindiens – découverts lors des voyages de Christophe Colomb et de ses émules - soient considérés comme des égaux et traités avec justice, et celle de Juan Ginés de Sepúlveda qui s’appuyait sur la thèse aristotélicienne de la « Servitude Naturelle » pour affirmer que leurs mœurs barbares et leur aspect autorisaient les peuples civilisés à les dominer. C’est-à-dire, pour parler crûment, qu’ils étaient des sous-hommes. On trancha finalement en faveur des Indiens, une décision qui fut peu respectée et qui, de plus, entraîna un désastre. En effet, privés d’une main d’œuvre locale bon marché, les propriétaires terriens du Nouveau Monde se tournèrent vers la traite des Noirs et cette abomination que fut l’esclavage.
On sait, par des récits, des romans, des ouvrages scientifiques, des films, les discours et affrontements politiques et l’admirable musique afro-américaine, les souffrances qu’entraînèrent les traitements barbares des siècles d’esclavage.
Celui-ci fut enfin aboli par le Président Abraham Lincoln en 1865, et les choses commencèrent à évoluer – lentement – vers un peu plus de justice.

Mais on n’en avait pas fini avec « la race » et on vit renaître ce mot destructeur au cœur de l’Europe, en Allemagne, où Hitler l’utilisa pour attirer puis galvaniser ses partisans.
Ce fut un coup de maître, car c’est en grande partie grâce au pouvoir discriminateur du mot « race » qu’il parvint à séduire les Allemands, et que rien ne soude davantage un groupe que d’avoir un ennemi commun. Hitler, qui avait besoin d’un bouc émissaire pour fanatiser son peuple, désigna les Juifs pour remplir ce rôle. Mais on n’était plus au temps des pogroms, et les Allemands avaient l’habitude de vivre avec des gens de religions différentes : il y avait des Allemands catholiques, des Allemands protestants et des Allemands juifs. Un peu plus loin, leurs voisins Russes étaient orthodoxes et, au Sud, vivaient les Musulmans avec lesquels on commerçait.

Ils n’appartenaient pas à la même religion, on ne les aimait pas forcément, mais ils étaient quand même tous des monothéistes, des enfants du même Dieu.
 Et par ailleurs le monde avait évolué et la société n’eut pas accepté qu’on traitât de façon barbare des êtres qui étaient nos semblables ; on utilisa donc le mot race en le détournant de son sens premier pour en faire la marque d’un fossé infranchissable.
Substituer le mot race au mot religion s’avéra être d’une efficacité redoutable, car les Juifs cessèrent d’être d’une religion différente pour devenir d’une race différente, un mot qui avait gardé la connotation infériorisante et méprisante héritée du temps de l’esclavage.

Les Juifs reçurent donc l’interdiction de s’unir à des gens d’une autre religion, ils n’eurent plus le droit d’exercer des métiers « nobles », et on les dépouilla de leurs biens avant de les déporter en masse - hommes, femmes et enfants mêlés - vers les Camps de la Mort et les Chambres à Gaz.
Ils étaient subitement devenus des êtres « pas comme nous », des gens qui risquaient de ternir la pureté raciale et l’aryanité des autres Allemands, et les enfants issus d’un mariage mixte furent considérés comme aussi dangereusement polluants que leur parent juif.
Seule la « solution finale », c’est-à-dire la disparition physique de tous les Juifs était en mesure d’écarter un tel danger.

Mais le nazisme faisait plus que protéger la pureté raciale des Allemands, il leur donnait le moyen de regonfler un narcissisme mis à rude épreuve par la défaite de la guerre de 14-18 et le Traité de Versailles, suivis d’années de désordre et de misère.
Tout à coup, par la magie du verbe, ils faisaient partie d’un peuple d’élite, d’une race supérieure. Être au bas ou au plus haut de l’échelle sociale n’avait plus d’importance puisque riches ou pauvres, petits patrons ou employés, diplômés ou pas ils étaient quand même supérieurs aux riches banquiers qui se promenaient indûment dans de superbes automobiles ou qui se pavanaient dans leurs luxueux magasins, comme ils l’étaient aussi à ces Einstein, Freud, Thomas Mann, Johann Strauss ou Marc Chagall qui occupaient jusque-là le devant de la scène et dont on leur rebattait les oreilles.
Eux en revanche étaient les enfants aimés d’une mère aimante dont ils étaient heureux et fiers de protéger la pureté comme l’avaient fait les chevaliers d’autrefois.
Comment ne pas approuver celui qui avait autant regonflé leur narcissisme ?
Et ils l’avaient approuvé, massivement.

Ils n’étaient pas plus mauvais que d’autres, mais ils se sentaient humiliés, tant par la défaite militaire que par les querelles internes et l’incurie de leurs dirigeants, et leur narcissisme souffrait.
 Or tout peuple, comme chaque citoyen, a un besoin vital de se sentir fier de ce qu’il est et de son pays.

Négliger ce besoin provoque forcément une riposte violente, comme nous l’a appris le nazisme et comme nous le montrent actuellement des citoyens de pays qui se sont sentis mésestimés par le passé.
 
© Gabrielle Rubin - Tous droits réservés

Lire la suite...

Oui, la psychanalyse est bien une science

- Réflexions - Vendredi 17 Février 2023


"Madame Gabrielle Rubin étant décédée le 27 décembre 2022, ce texte est publié à titre posthume, selon sa volonté et avec l'accord de sa famille."

Oui, la psychanalyse est bien une science

« La psychanalyse n’est pas une science ! » Cette affirmation revient souvent car elle est l’argument dont se servent ceux qui veulent la dévaloriser, insinuant ainsi qu’elle ne serait fiable ni pour mieux comprendre le monde qui nous entoure, ni pour accroître notre culture ni - et surtout - comme thérapeutique.

Or la psychanalyse est bien une science, et ceux qui lui refusent ce titre ignorent tout simplement qu’il n’existe pas qu’un seul et unique modèle de sciences, celui dit « des sciences dures ».
Ces sciences-là sont rassurantes parce qu’elles n’ont pas droit à l’erreur : si le problème a été correctement posé, sa solution sera parfaite. Et en effet, comment pourrait-on admettre que la fusée ne se pose pas sur la Lune à l’heure et au lieu dits, qu’une bille de plomb, jetée du haut de la Tour de Pise arrive avant la bille de liège, ou que telle autre invention humaine refuse de se conformer aux lois, très strictes, des sciences exactes ?

Avec les sciences dures, pas d’hésitation, pas de flou, pas de danger : on sait exactement où on en est.
La science comporte cependant de nombreuses branches : à côté des sciences exactes, on a les sciences humaines, les sciences de la terre, les sciences qui concernent les animaux, (actuels ou préhistoriques), les plantes, etc. Mais, tout en présentant de grandes différences entre elles, toutes les sciences ont pourtant les mêmes principes de base, qui les différencient de façon drastique de ces autres grandes manifestations de la créativité humaine que sont les arts.

Tout en étant souvent complémentaires, art et science sont en effet foncièrement différents : une première différence fondamentale se trouve dans leur rapport au rationnel ; en effet si, tout comme l’art, les avancées scientifiques doivent beaucoup à l’inconscient et au travail de liaison qu’il suscite, ses créations sont cependant toujours contrôlées par le conscient, elles font référence aux connaissances antérieures, et elles sont soumises au verdict de la raison.
Alors que les créations de l’art, qui a lui aussi l’inconscient pour point de départ, sont en concordance avec l’affectivité et les émotions, et non avec le raisonnement. La science s’adresse à notre raison, tandis que l’art mobilise nos affects.

Une autre différence essentielle entre art et science est que toutes les sciences sont susceptibles de faire des progrès, alors que l’art n’en fait pas et, d’ailleurs ne se soucie pas d’en faire : qui prétendra que les dessins de la grotte de Lascaux sont inférieurs aux tableaux de Brueghel, qui seraient eux-mêmes inférieurs à ceux de Monet ou de Picasso ?

Une troisième différence capitale se trouve dans la recherche de la preuve ; en effet, tout scientifique cherche la preuve qui validera ses résultats ; alors qu’on se demande quelle « preuve » pourrait bien concerner l’art et, d’ailleurs, où il pourrait la trouver.
Et en effet, les scientifiques veulent trouver une preuve objective, ou aussi proche que possible de l’objectivité, alors que la valeur que l’on attribue à l’art est subjective.

Après avoir énuméré quelques-unes des différences de base qui opposent les arts et les sciences, j’étudierai maintenant ce qui relie et/ou différencie les sciences entre elles.
Celles-ci se divisent essentiellement en deux branches : les sciences dites exactes et celles qui ne le sont pas tout à fait, c’est- à-dire toutes celles qui étudient le vivant.

La principale différence entre ces deux groupes c’est que les expériences des premières sont reproductibles : quel que soit l’expérimentateur - homme, femme ou même robot - et quel que soit le lieu ou le moment, si on refait l’expérience dans les mêmes conditions et en suivant le même protocole, le résultat sera le même.

A l’inverse, il ne peut y avoir de répétition à l’identique pour le vivant, d’une part parce que chaque individu : plante, animal ou être humain, n’est tiré qu’à un seul exemplaire. Et d’autre part parce que chaque chercheur modifie, peu ou prou, le sens de sa recherche puisqu’il est soumis à sa propre affectivité et qu’il est influencé par sa société, par son époque, par tout son environnement.
De toutes les sciences du vivant, la psychanalyse est sûrement celle qui s’écarte le plus de l’objectivité, parce qu’elle introduit une variable supplémentaire : le temps.
 En effet, même lorsque le psychanalyste redit une même interprétation pour la cinquième fois, celle-ci n’est ni reçue ni comprise exactement comme les précédentes, parce que le patient a évolué entre-temps.

Et que le psychanalyste, lui aussi, a changé : il a fait des progrès dans la compréhension de son patient, il a davantage sollicité son inconscient, il a vécu et acquis plus d’expérience, et il a donc obligatoirement donné chaque fois une interprétation légèrement différente et plus féconde.
Comme toutes les autres sciences du vivant, la psychanalyse a cependant avec les sciences exactes des convergences bien plus fondamentales que ne le sont leurs divergences : comme les sciences dures, la psychanalyse fait constamment des progrès, puisque nous en savons beaucoup plus qu’autrefois sur notre inconscient, sur nos motivations, sur les causes qui entraînent les transformations de la société et sur le monde dans lequel nous vivons.

Enfin et peut-être surtout, et comme le font toutes les sciences, la psychanalyse cherche constamment la preuve... sans jamais la trouver parfaitement. Mais cela importe peu, car ce qui compte, ce qui est essentiel, c’est de la chercher.

Autrement dit, et en écartant toute croyance, c’est de se soumettre constamment au verdict de la raison, car c’est là l’état d’esprit qui, plus que tout autre, caractérise un scientifique.


© Gabrielle Rubin - Tous droits réservés
 

Lire la suite...
"Ces mauvaises mères qu'on aime tant..." à nouveau disponible à la vente !

"Ces mauvaises mères qu'on aime tant..." à nouveau disponible à la vente !

- - Mardi 10 Mai 2022


Chers lecteurs, chers visiteurs,
Je suis heureuse de vous annoncer que mon ouvrage "Ces mauvaises mères qu'on aime tant", est à nouveau disponible à la vente dans une nouvelle version, publiée aux Editions Les Cygnes !

Cette nouvelle édition en format poche vous attend sur toutes vos plateformes de vente habituelles, et sur le site des Editions Les Cygnes.

Vous pouvez aussi passer commande directement auprès de votre libraire.

Prix de vente : 12 €

Liens directs :

Place des libraires

Amazon

Fnac.com

Editions Les Cygnes

Je vous souhaite une bonne lecture.
Gabrielle Rubin

--------

L’amour maternel est-il toujours inconditionnel ? Est-il possible que certaines mères soient incapables d’aimer leur enfant ? Les enfants « mal-aimés », privés de cet amour essentiel, adorent d’autant plus leur mère, idéale et parfaite à leurs yeux. Ils portent souvent la culpabilité du rejet maternel et, toute la vie, gardent la certitude qu’ils sont indignes d’être aimés. Mais un amour maternel passionné et envahissant – qu’il soit excessif ou séducteur – est tout aussi destructeur pour un enfant car il le condamnera à la solitude amoureuse et même amicale. Gabrielle Rubin traite ici un sujet peu abordé, en mêlant réflexions, recherches personnelles et références psychanalytiques. La mise en lumière des parcours de personnages, connus et anonymes, permettra à chacun de décrypter ses propres expériences…
 

Lire la suite...
logo linkedin logo twitter logo facebook logo insta